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mardi, novembre 13, 2007
Le Beau et le vrai
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Le beau et le vrai
La beauté, disent certains savants, est - lointain écho du « ce qui est beau est bon » des Grecs de l’Antiquité - un paramètre essentiel de la vérité d’un système. L’harmonie que dégage un ensemble relève de sa pertinence et non pas seulement du sentiment du beau qu’il dégage. Que la beauté soit un principe essentiel de la vérité, cela devrait se vérifier dans toutes les sciences ; elle devrait également se confirmer en histoire - que certains humoristes qualifient de science et d’autres, plus austères et plus réalistes, de fiction fonctionnelle déroulant le récit du monde et nécessaire au Pouvoir pour assurer sa domination. De la même façon que la mystique emprunte son vocabulaire à l’érotisme, la science emprunte, souvent, le sien à l’esthétique. Dans ce cas, l’histoire aurait le même rôle que la théologie, qui n’est pas un développement discursif, comme le prétendent son étymologie et ceux qu’elle dévergonde, mais seulement « une branche de la littérature fantastique ». La seule différence entre les Évangiles et le Don Quichotte, c’est que Cervantès n’obligeait pas, sous peine de damnation éternelle, ses lecteurs à croire à la réalité de ses moulins et ne les livrait pas à l’Inquisition.
Cependant, la beauté d’une proposition philosophique ou historique, engoncée dans son orgueil glacé, peut très bien vouloir se passer du monde, peut très bien ne renvoyer qu’à elle-même et trouver en elle-même seule sa justification. L’autoréférentiel, le rêve de tout artiste et de tout homme de pouvoir ! Quels magnifiques développements que certains récits ! On se rappelle les discours des dirigeants de l’Union Soviétique : inattaquables du point de vue de la logique ! Toutes les parties de ces discours se complétaient. Exactement comme la flèche de Zénon : il est évident que du point de vue de la démonstration logique pure, la flèche est immobile : et pourtant, la flèche se déplace ; qu’Achille court plus vite que la tortue, nous le savons, et nous avons l’intuition que le mouvement existe. Cependant le paradoxe de Zénon continue à défier toute négation logique.
L’Armée d’Haïti a voulu, tout au long de son existence, projeter une image héroïque. Cette image d’Épinal est la surface de l’Armée d’Haïti, son masque, le loup qu’elle s’ajuste sur le visage quand elle traîne ses sabres et ses bottes cirées à miroir sur les parquets des salons de la haute société haïtienne.
Les Évangiles sont certainement l’un des plus beaux textes qui existent, et il a nourri les esprits les plus hauts, les plus fraternels, les plus généreux. C’est l’un des textes fondateurs du vivre ensemble. Elle est sinon la base, du moins une composante vitale de l’humanisme et de l’éthique qui guident nos actes. Elle a provoqué la plus grande révolution que l’on connaisse.
La bourgeoisie a été porteuse de développement industriel, et elle a été le moteur de l’histoire moderne. Elle a fait la Grande Révolution Française qui a inventé les concepts de liberté, d’égalité, de fraternité.
Mais la beauté n’est pas le seul critère d’appréciation d’un système : sa conformité au réel en est un autre. L’équilibre des parties, leur disposition harmonieuse, leur intégration pour former un tout cohérent, oui, sans doute, cela est nécessaire à la vérité d’un système. Mais, hélas, il y a le réel. Quel dommage, le réel ! La vie de ceux qui se sont donné le rôle de mettre en récit les différents aspects de la mouvance haïtienne serait tellement plus agréable s’il n’y avait le réel, comme la vie des professeurs d’université serait tellement plus heureuse s’il n’y avait les étudiants…
Et le réel est têtu ! Il compte comme l’un des critères de vérification d’un système. Un système aura beau dérouler sa tapisserie magnifiquement tissée et bariolée, si les motifs de cette tapisserie ne sont pas conforme au réel, elle ne sera pas adoubée par la vérité.
C’est ainsi que la bourgeoisie haïtienne n’a jamais tenu son rôle : si jamais elle avait un rôle à jouer ! La grande ruse du Diable, dit-on, est de faire croire qu’il n’existe pas ; le tour de force de la bourgeoisie haïtienne est de faire croire qu’elle existe. La bourgeoisie haïtienne, depuis qu’elle prétend exister, n’a jamais œuvré pour la liberté, l’égalité, la fraternité. Beaucoup des malheurs d’Haïti viennent de ce que ses « bourgeois » n’ont jamais vraiment cru en ce pays. Ils n’ont jamais développé une culture bourgeoise proprement haïtienne. Un « bourgeois » haïtien, au milieu du siècle dernier, était pâmé de fierté quand un aristocrate anglais de passage à Port-au-Prince lui confia « qu’à part la couleur de votre peau, on se croirait à Londres, dans un salon de l’aristocratie anglaise ». Ce bourgeois haïtien ne connaissait pas l’humour anglais. Et il ne savait pas qu’au même moment, à l’autre bout du salon, près de l’embrasure d’une fenêtre, un planteur américain le toisait, qui venait de recevoir un compliment aussi prodigieux. « Je vois », dit son interlocuteur, « que vous admirez ce magnifique spécimen d’homme. Il a presque deux mètres. Et quel port !… » L’Américain répondit : « Oh ! Je me disais seulement qu’il eût fait un magnifique étalon pour mes négresses, dans mes plantations, dans le Sud. Il eût pu me produire de merveilleux négrillons qui deviendraient plus tard de bons ramasseurs de coton, rudes, travailleurs, résistants… »
L’Armée d’Haïti aura beau faire : elle ne pourra que faire semblant d’être l’héritière de « L’armée sublime des va-nu-pieds » des guerres de l’Indépendance. Elle est une armée créée au temps de l’occupation américaine pour combattre les Cacos et réprimer les mouvements populaires.
La bourgeoisie haïtienne, si elle existe, ce serait de manière anthologique, en morceaux choisis, en quelque sorte : la bourgeoisie d’État, parasitaire, la « bourgeoisie » duvaliériste, partie prenante de la terreur que fit régner les Duvalier, a freiné les tentatives de certains entrepreneurs de développer quelques secteurs de la vie économique haïtienne. Une bourgeoisie qui n’a jamais été productrice, qui vivait d’import-export, une bourgeoisie rentière…
La hiérarchie de l’Église catholique d’Haïti ne s’est jamais alignée sur des positions nationales. Elle a organisé la répression de la culture haïtienne, sous prétexte d’évangélisation. Comme elle l’a fait partout d’ailleurs. Elle a entrepris des croisades contre le vodou. Elle s’est livrée à une véritable opération de décervelage des citoyens haïtiens, quand elle était étrangère ; quand elle est devenue nationale, elle s’est dressée contre ce que la frange progressiste de son clergé a créé de plus fraternel, la théologie de la libération, qui accorde une oreille attentive aux besoins du petit peuple et lutte pour les combler. Mais derrière les mornes il y a d’autres mornes, disent les paysans haïtiens, et derrière l’Église catholique, il y a pire : c’est, armé des Évangiles porteuses d’amour, d’espoir et de fraternité, que, dans les années quatre-vingt dix, un pasteur protestant a voulu « désacraliser » le Bois Caïman. « Le Bois Caïman fut un pacte diabolique entre Satan et le peuple haïtien. », disait ce pasteur. Imaginez : l’acte fondateur d’Haïti assimilé à un pacte avec le diable ! Les hiérarchies chrétiennes n’ont même pas compris qu’il faut tout changer pour que tout reste pareil.
Mais voilà : nous continuons à regarder le monde non d’après ce que nous voyons, mais d’après ce que nous savons – ou croyons savoir. D’après ce que l’Histoire nous a mis en tête. D’après les histoires qu’on nous a contées. D’après les grilles de lecture qu’on nous a imposées. Ce qui fait qu’il y a un divorce entre le système et le monde.
Nous continuons à croire que l’Armée est grande, que les églises sont charitables, que la bourgeoisie est productrice de richesses.
Cette foi est nécessaire. Elle est l’un des instruments essentiels de cette petite musique de nuit qui assure la cohérence de notre être et sans laquelle nous ne saurions vivre. Oui, cette foi est nécessaire, et l’on sait que la foi, autre mot pour désigner le réel, n’a rien à voir avec la logique…
Les photos que le CIDIHCA propose dans ce chapitre ont été choisies davantage pour leur plus-value métaphorique que pour leur valeur documentaire. Les visages qu’elles présentent appartiennent davantage à des personnages qu’à des personnes. Elles nous apprennent que ce qui est beau n’est pas toujours vrai.
Roland Paret
rolandlapanique@hotmail.com
Paru dans Haiti Tribune 2006
jeudi, novembre 01, 2007
Michèle Montas
From: edwidgelafleur@hotmail.com
Subject: Michèle Montas: porte-parole du Secrétaire Général de l'ONU
Date: Thu, 25 Oct 2007 09:33:11 +0000
Ban-Ki Moon en compagnie de Michele Montas
Michèle Montas est née en Haïti plus spécifiquement à Port-au-Prince dans une famille bourgeoise composée de trois enfants. Au courant de sa jeunesse, elle se trouva dans l’obligation de fuir le pays (durant le régime de Duvalier) pour se réfugier aux États-Unis où elle obtint une maîtrise en journalisme à l’Université Columbia de New York en 1969.
L’année suivante, elle retourna en Haïti où sa carrière journalistique débuta. Elle fit la connaissance de son futur mari Jean Léopold Dominique, grand journaliste qui critiquait le gouvernement et qui était en charge de Radio Haïti Inter depuis 1968. Cette situation obligea le couple quelques années plus tard à s’exiler à New-York. Ainsi, le 28 novembre 1980, les studios de la radio Haïti Inter furent détruits et toutes les personnes présentes à la station furent arrêtées. Michèle Montas fut emprisonnée (avec d’autres journalistes et activistes des droits humains) et expulsée aux États-Unis seulement avec des vêtements sur le dos.
Pendant cette période, l’époux de la journaliste se trouvait à l’ambassade du Venezuela à Port-au-Prince et avait reçu des menaces de mort. Deux mois plus tard, le couple a été réuni à New York et leur dossier a été immédiatement pris en charge par 'Human Rights First'. Michele Montas et son époux se sont vus accorder l’asile politique aux États-Unis. La journaliste ainsi que son conjoint furent l’un des premiers clients obtenant l’asile politique via 'Human Rights First (1)'. Madame Montas occupa la fonction de journaliste en 1980 pour la radio de l’ONU à New York. Elle fut responsable de la section française de cette radio.
© static.flickr.com
Suite à la chute du régime de Duvalier en 1986, le couple revint en Haïti et exerça ses fonctions journalistiques à Radio Haïti Inter. Le couple dut quitter de nouveau le pays après le coup d’état de 1991 dirigé par le général Raoul Cédras entraînant la chute d’Aristide. Une fois que ce dernier revint au pouvoir avec l’appui du gouvernement Clinton, le couple retourna en Haïti en 1994.
Michele Montas et son conjoint entrèrent en désaccord avec le gouvernement de Jean-Bertrand Aristide et critiquaient le parti Lavalas sur les ondes. Jean Dominique, Directeur à l’information de Radio Haïti, fut tué dans la cour de sa station de radio le 3 avril 2000 par des inconnus. Suite à cet événement, madame Montas se trouva à la direction de Radio Haïti Inter dans la capitale de Port-au-Prince. Elle se lança également dans la lutte contre l’impunité de l’assassinat de son célèbre feu mari.
La veuve fut victime d’une tentative de meurtre contre sa personne le 25 décembre 2002 dans sa résidence. Au cours de l'attaque, l’un de ses gardiens, Maxime Séide perdit la vie. Les journalistes de Radio-Haïti subissaient également des représailles. La station dut fermer ses portes en 2003. Ces faits marquants poussèrent la journaliste à retourner aux Nations Unies. A New York, elle prit le poste de porte parole de Julian Robert Hunte, président de l’Assemblée générale des Nations Unies.
© columbia.edu
De cette façon, monsieur Hunte recherchait en 2003 un(e) journaliste des Antilles possédant une réputation professionnelle internationale et connaissant l’ONU. Dans cette perspective, madame Montas a été embauchée par le biais d’une offre d’emploi formelle. La journaliste fut durant 13 mois la porte parole de la 58ème session et oeuvra auprès de 14 autres professionnels spécialisés dans différents champs : politique, juridique ou économique.
Le 1er janvier 2007 Ban Ki-Moon nouveau secrétaire général des Nations Unies a commencé son mandat de cinq ans. Le dimanche 31 décembre 2006 Ban Ki-Moon nomma madame Montas, journaliste de réputation professionnelle internationale en tant que son porte-parole. Le 1er janvier 2007, elle est officiellement entrée en fonction( 2). Il importe de souligner que madame Montas est devenue la première femme porte-parole officiel d’un secrétaire général depuis la création de l’ONU (3). Michèle Montas a succédé au Français Stéphane Dujarric qui occupait ce poste depuis le mois de juin 2005.
Le fait d’être une femme francophone a joué en sa faveur. Ainsi, le secrétaire général souhaite donner une plus grande place à la francophonie au sein du fonctionnement de l’Organisation. La parité représente également un facteur capital pour Ban Ki-Moon. Pour ce dernier, il importe que les femmes soient positionnées à des rangs de haut niveau aux Nations Unies.
Les fonctions principales de la porte-parole des Nations Unies consistent notamment à assurer une présence médiatique quotidienne et un contact permanent avec Ban Ki-Moon concernant les questions d’ordre international. Madame Montas doit aborder aux côtés du Secrétaire général des dossiers complexes, écouter ses proches collaborateurs, discuter des questions très difficiles et sensibles, examiner le fonctionnement des différents gouvernements du monde.
Elle représente donc une proche collaboratrice du secrétaire général de l’ONU et détient le rôle de rendre accessible aux journalistes l’information sur les crises les plus sensibles dans le monde. Le poste de porte parole du Secrétaire général de l’ONU occupé depuis le 1er janvier 2007 constitue une étape de haute importance dans la carrière de madame Montas. Toutefois pour cette dernière, la lutte demeure la même que cela concerne les plus désavantagés d’Haïti, les réfugiés du Darfour, les personnes occultées et opprimées de la Somalie ou ailleurs dans le monde.
Notes :
(1) Pendant plus de 25 ans, cet organisme a aidé des milliers de personnes fuyant la persécution.
(2) Le 1er janvier représente une date de haute importance pour Haïti et le peuple noir. Ainsi, le 1er janvier 1804, l’île de Saint-Domingue (ancien nom d’Haïti) est devenue indépendante et cette ancienne colonie française devint le premier État noir des temps modernes ainsi que le deuxième État indépendant des Amériques suite aux États-Unis.
(3) Ban Ki-Moon a succédé au deuxième mandat quinquennal de l’ancien chef ghanéen de la plus importante organisation mondiale, Kofi Annan. Ki-Moon a nommé l’Indien Vijay Nambiar au poste de chef de son cabinet
(4) plus précisément durant deux exils de 1981 à 1987 et pendant le coup d’état de 1991
Formations et Occupations :
- Madame Montas a gradué à l’université du Maine en journalisme et elle est détentrice d’une maîtrise en journalisme de l’Université de Columbia à New York en 1969.
- Michèle Montas a débuté sa carrière en tant que journaliste à Port-au-Prince pour Le Nouvelliste. Plus tard, elle a ¦uvré en tant qu’éditrice en chef pour le magazine culturel Conjonction.
- De 1970 à 1980, elle fut journaliste sur les ondes de radio Haïti Inter, l’unique radio libre du pays. Elle occupa la fonction de présentatrice du journal de 7 heures et quelques années plus tard elle devint directrice de cette radio (en 2000).
- Au début des années 80, elle travailla dans la section française de la Radio des Nations Unies en tant que présentatrice durant son exil à New York.
- La journaliste fut fonctionnaire à l’ONU au Cabinet de M. Hunte durant 10 ans4. Au courant des années 90 jusqu’au 31 décembre 2006, elle occupa la fonction de rédactrice en chef de l’unité francophone de la radio de l’ONU. Au sein de ce poste, elle continua son combat en faveur de la liberté d’expression.
- En 2003, Michèle Montas devint porte-parole de l’Assemblée générale de l’ONU.
- Le 1er janvier 2007, elle fut nommée porte-parole du secrétaire général des Nations Unies Ban Ki-Moon, le Sud-Koréen.
Récompense :
-Prix Reporters sans frontières – Fondation France, 2002. Ce prix honore un(e) journaliste qui a fait preuve d’une liberté d’information via son activité professionnelle, ses prises de position ou sa contenance
Documentaire connexe:
€L’Agronome (2004), un film documentaire de Jonathan Demme avec la collaboration du feu Jean Dominique. On y fait le portrait du journaliste ainsi que de sa femme Michèle Montas qui donnent leur point de vue sur les nombreux combats d’Haïti et des violations des droits humains. The Agronomist constitue le titre original de la version anglaise.
Edwidge-
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