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mardi, octobre 03, 2006

Chasimbi Culture Haïtienne dans le monde

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Paru dans HaIti Tribune
sous la plume de:

Roland Paret (auteur de la Trilogie "L'Assemblée des grands vents).Edition du Cidihca

Le rire de Dieu ou le ricanement de Satan ?

Dieu ne rit jamais, ni dans l’Ancien Testament ni dans le Nouveau. Dieu réprouve le rire. Quand Cham a ri, il a été châtié : exilé dans le désert, il a été brûlé par le Soleil. C’est l’ancêtre des Nègres. Ce fut le rire le plus funeste de l’histoire de l’humanité. Parce que Cham a ri, toute une race a été punie. Quand Sarah a ri, Dieu s’est fâché, et elle a dû se défendre d’avoir ri. « Je n’ai pas ri, Seigneur ! ». Abraham était effrayé.
André Breton – était-ce quelqu’un d’autre ? – avait observé que l’ironie, c’est-à-dire, en fin de compte, en bout de ligne, le rire sinon le sourire, ne peut être que le fait d’un peuple civilisé ou de quelqu’un de très civilisé. Un sauvage, peuple ou individu, ne rit pas.
C’est là, justement, le paradoxe : Dieu est certainement quelqu’un de très civilisé, puisque – du moins en principe, c’est-à-dire dès le commencement - Il connaît tout. Il connaît l’origine, Il connaît la fin. Il connaît tout ce qui palpite dans le Monde. Il a lu tous les livres, a vu tous les spectacles, a entendu toutes les mélodies. Mieux - pire ? - n’est-Il pas l’Auteur de toutes ces œuvres ? Il existe une telle unité, a-t-on noté, dans les productions littéraires et artistiques, poèmes, romans, peintures, musique, qu’on doit leur supposer un auteur unique. Cet unique auteur, ne serait-ce pas Dieu ? L’unité des œuvres et des différentes mouvances de l’art est la vraie démonstration de l’existence de Dieu, mieux que la sixième preuve. Alors, pourquoi n’a-t-Il jamais ri ? Seul Augustin a cru percevoir le rire de Dieu, et ce rire l’a épouvanté : « Ô Seigneur, ma lumière, ta Vérité ne va-t-elle pas ici encore rire de l’homme ? »
Or Dieu, installé dans l’Éternité, ne connaît pas le Temps. Pour pouvoir rire, si évidemment Il veut rire, Il doit nécessairement écouter les histoires que les Humains Lui content.
Dieu doit bien rire quand Il entend les histoires des Haïtiens. Il doit rire de ce rire de dérision qui terrifiait Augustin. Il rit – « Bon Dieu rit » ! – d’autant plus qu’Il sait que ces histoires sont le fait d’un seul : de la même façon qu’il y a un seul Dieu au ciel et un seul prince sur terre, il y a un seul conteur au ciel et un seul historien sur terre, surtout sur la terre d’Haïti. Comme dans les autres déploiements de la parole, l’historiographie haïtienne présente une telle unité qu’on doive croire qu’un seul historien a écrit toutes les histoires d’Haïti. Quelle est cette fatalité qui fait que, depuis le temps des origines, ceux qui en Haïti s’approprient le rôle de transformer le temps en récit, les Ardouin, Madiou, Nau, Timoléon Brutus, Vergnaud Leconte, Pauléus Sannon, Dantes Bellegarde, tous les autres, y compris la plupart de ceux d’aujourd’hui, avatars de l’Historien unique, ceux-là content inlassablement la même chronique, celle concernant la même classe sociale, celle des gens « du dedans », ces gens du dedans qui sont seuls à parler ? Dieu rit, et c’est peut-être à propos d’Haïti seule qu’Il rit : Fin dialecticien, bien plus que l’une de Ses créatures, qui, croyant imiter les pratiques du Camarade Dieu, a inventé cette horreur philosophique, cet objet volant métaphysique non identifié qu’est l’autocritique, Il doit se demander, Lui qui - Son ultime ruse ! - a créé Satan, Son contraire, Son double inversé, Dieu doit se demander comment, pourquoi, en Haïti, c’est toujours le Même qui se répète, et Il s’étonne : « Mais où, en Haïti, est l’Autre ? »
Avec dans la voix ce qu’il faut de crainte et de tremblement, la même crainte et le même tremblement qu’il y avait dans celle de saint Augustin quand il s’adressait à Lui, on pourrait risquer une réponse : « Seigneur ! L’Autre, en Haïti, est bâillonné, il ne peut s’exprimer. Ceux qui, en Haïti, ont la charge de conter la suite et l’agencement des temps, les historiens, ne donnent la parole qu’au Même ! » C’est le Même qui se répète, sans fin, infatigablement, sans désemparer… C’est le Même qui s’arroge le droit de parler pour l’Autre, de parler au nom de l’Autre.
L’Autre, en Haïti, quand on le nomme, c’est du bout des lèvres : les Lamour Dérance, les bandes de Sans-Souci, Petit Noël Prieur, les Cacos, les Piquets : tous des exclus, des gueux, des « moun an déo » quoi ! Les habitants du pays parallèle… Il ne faut surtout pas leur donner la parole : leurs mots provoquent des maux ! Leurs mots menacent la société ! Oui, ce sont les historiens qui ont appris aux « élites » haïtiennes à penser en ces termes des « moun an déo ». Les historiens haïtiens ont construit l’idéologie qui justifie le mépris des « élites » haïtiennes pour les petites gens. Ils ont légitimé le mépris des « Élites » pour le peuple. N’est-ce pas normal ? Ils font partie, dans leur majorité, de ces « élites »…
Ceux qui ont structuré les mythes fondateurs d’Haïti ont mis l’accent sur le Héros. Ils ont ignoré le peuple. Ils ont imposé une vision tranchante de l’Histoire d’Haïti. Cela faisait l’affaire des Héros et de leurs descendants. Ils nous ont fait croire que l’histoire des origines se résume au fourmillement de quelques lignées. De sorte que jusqu’à présent, l’histoire de ces petites gens se présente comme l’histoire en creux des « élites ». Or le peuple existe en soi… Ils sont rares, en Haïti, les historiens qui ont répercuté les dires des opprimés. Heureusement qu’ils existent ! Qu’ils se rassurent ou qu’ils s’inquiètent : ce grondement vaste et sourd qu’ils entendent, ce n’est pas le rire de Dieu, c’est le ricanement de Satan.

Les Haïtiens de New York

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